lundi 30 août 2010

Tu t'éveilles et je souris


Je ne connais pas l'Inde.
Mais l'Inde me connait.
Connait mon pays.
M'a apporté la réponse.
Elle était juste ici.
Elle était juste ici mais tout se déroulait là-bas. Tout se déroule encore. Tout se déroule depuis plus d'un an.
Tout empire, tout court, tout se détruit.
Cela tient en quelques mots.

Inde, toi blessée par tant d'ignorances, de haines, d'intolérances. Tu montres l'exemple sur tes murs, dans tes phrases, sur ta peau, dans tes rêves. Inde, mon pays n'est pas de ta trempe.

[Je ne trouvais plus les mots.]
J'étais si loin, je suivais, je regardais mais je ne comprenais pas. Je ne saisissais pas de quel pays il s'agissait. Je n'étais pas sur place, je ne pouvais être réellement sûre.
Alors j'ai cherché dans ma mémoire d'enfant, pour être sûr que cela était bien vrai, que cela était possible. Que cela était possible dans mon pays.
Dans ma mémoire, j'y ai vu mon père. Il me parlait.

J'avais ce livre, j'étais dans ma chambre. Ma chambre jaune avec des poissons bleus.
Ce livre était religieux. Il racontait Jésus. Sa vie. Le livre devait faire 5 pages cartonnées. Les contours étaient coupés, il était drôle ce livre. Tout contourné. Je lisais. Je lisais la phrase présente sur chaque page. C'était facile à lire, c'était bien. Il ne signifiait pas grand chose pour moi. La vie d'un homme, que je connaissais bien sûr. Je connaissais son nom. Cet homme se disait de "ma" religion. "Ma" religion, caractéristique évidente que j'intégrais.
Mon père était alors à côté de moi, il me semble. Tout se brouille, j'ai peur d'imaginer, de broder, mais il me semble qu'il était bel et bien assis à côté de moi, là, ici. Il faisait nuit, c'était ma dernière lecture avant de dormir. Oui, c'était bien ça. Le lit était contre le mur, ma soeur l'a changé de place depuis. Et la lumière du couloir était allumée.
J'ai dû demander quelque chose. Je ne sais plus comment cette discussion est arrivée. Ai-je demandé s'il y avait d'autres personnes qui étaient comme Jésus et que je ne connaissais pas? Ai-je demandé si des personnes ne croyaient pas en lui? Non, ce n'est pas exactement cela. J'ai dû demandé pourquoi Jésus n'était pas accepté, au début. Pourquoi plein de gens le rejetaient. C'est comme ça que cela a dû commencé. On a parlé. Il m'a parlé, en fait.

C'est ainsi que mon père m'a parlé de la Tolérance. De la Différence. Des Croyances, des Vérités. Il m'a parlé de la Diversité. De l'Humanité, ce qui la forme : LES HommeS. Leur regroupement dans tout une globalité. Je ne me souviens pas les phrases, mais je suis sûre du moment, je suis sûre du message.
Depuis, je vis avec cette conception.

Mon pays avait les conceptions de mon père. Ce que mon père m'expliquait était vrai, était réel. Il me suffisait de sortir pour le vérifier, ce que mon père disait était vrai. La Tolérance était là, et je la voyais, je la sentais. Comment en aurait-il été autrement? Mon père me l'avait décrite. Mon pays était ce que mon père m'expliquait. Mon père m'a dit le Bon, le Juste, mon pays le dessinait.

Puis j'ai vu l'Intolérance. Je ne l'ai connu qu'au collège. Je ne l'ai saisis qu'à ce moment. J'ai dû rencontrer son hideuse face auparavant, mais je ne la comprenais pas, je ne la reconnaissais pas.
C'est ainsi que j'ai su. Que ce qu'avait dit mon père ne s'appliquait pas partout. C'est ainsi que j'ai su que les gens de mon pays n'avaient pas tous les mêmes conceptions que celles de mon père. Cela réveille. Cela fouette le sang, comme dirait Zola. Cela vous claque.

J'ai grandi.
Je suis partie.
Partie en Inde.
Et j'ai su l'Intolérance.
L'Intolérance totale, nationale, réelle, effrayante.
L'Intolérance dans mon pays.
Un homme qui divise le pays de mon père en autant de citoyennetés à des échelons différents.
Un homme qui renvoie, qui balaye, qui expulse. Visage connu, à vrai dire.
Un homme qui parle, qui influence, qui déverse sa bile acide, qui en fait déverser d'autres.
J'ai su l'Intolérance et j'ai eu peur. Ce n'était plus le pays de mon père.

Puis j'ai su les réactions. Internationales d'abord, nationales ensuite.
J'ai souri.

Car maintenant,
je sais que le pays de mon père sera éternel.


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